Au cœur de Louhans, le Musée d’Histoire et de Culture des Sourds nous invite à un voyage dans le temps et dans l’univers souvent méconnu du sport sourd. Son exposition temporaire actuelle, visible jusqu’en mars 2026, célèbre un anniversaire majeur : “Cent ans des Deaflympics (1924-2024)”, les Jeux Olympiques dédiés aux athlètes sourds. Une histoire riche, née en France, et dont l’écho résonne particulièrement ici, en Bresse.

L’exposition met d’abord en lumière la figure fondatrice de Rubens Alcais, journaliste sourd français qui, dès 1918, créait le journal “Le Sportman Silencieux”. Convaincu que le sport était “le noyau de la culture sourde, un puissant outil de lien social, d’émancipation et de fierté identitaire”, comme le rappelle Caroline Pelletier, présidente du musée, il cofonde en 1924 à Paris, avec le tennisman belge Antoine Dresse, les premiers Jeux Internationaux Silencieux. Ces jeux sont les ancêtres directs des Deaflympics actuels.

Le parcours proposé retrace cette épopée, depuis les premières pratiques sportives sourdes recensées dès 1890 jusqu’à l’évolution de ces Jeux, reconnus par le Comité International Olympique (CIO) en 1955 mais renommés “Deaflympics” seulement en 2003. Les visiteurs peuvent y découvrir des objets symboliques – médailles, broches, pins – mais aussi comprendre la signification du drapeau des Deaflympics, dont les couleurs et la forme évoquent le rassemblement visuel international de la communauté sourde.

Pourquoi cette exposition à Louhans ? Le lien avec le territoire est fort. Armand Pelletier, cofondateur du musée louhannais lui-même, fut un acteur de cette histoire : médaillé d’argent pour l’épreuve des 15 km en course à pied aux Jeux Internationaux Silencieux d’été de 1957 (une curiosité historique !), il organisa également les 9èmes Jeux Mondiaux des Sourds d’hiver à Méribel en 1979. Face à l’absence d’une grande exposition officielle en France pour ce centenaire en 2024, “il nous a semblé fondamental de valoriser cet événement historique ici, à Louhans”, souligne Caroline Pelletier.

Au-delà de la rétrospective sportive, l’exposition porte une dimension pédagogique et culturelle essentielle. Elle vise à “rendre visible une histoire souvent ignorée”, celle des athlètes sourds. Comme le rappelle le musée, ces sportifs, contrairement à leurs homologues olympiques ou paralympiques, ne bénéficient souvent ni de primes de victoire ni du statut de sportif de haut niveau en France, une situation pointée du doigt à l’Assemblée Nationale. L’exposition interpelle ainsi le public sur cette différence de traitement, tout en célébrant la richesse d’une culture visuelle, la force du collectif et le dépassement de soi incarnés par les Deaflympics. Elle s’adresse à tous, sourds comme entendants, pour une meilleure compréhension mutuelle.

Cette riche exposition a été rendue possible grâce à la collaboration de plusieurs partenaires, notamment l’INJS de Paris, les Archives du Comité Belge des sports des sourds, le Patrimoine Sportif des Sourds de France (PSSF) et la Fédération Nationale des Sourds de France (FNSF).

Une plongée passionnante dans un siècle d’histoire sportive et culturelle, à découvrir au Musée des Sourds de Louhans, pour porter un autre regard sur le sport et la communauté sourde.

(Source : Échange avec Caroline Pelletier, Présidente du Musée d’Histoire et de Culture des Sourds de Louhans, concernant l’exposition “Cent ans des Deaflympics 1924-2024”. Exposition visible jusqu’au 31 mars 2026. Infos pratiques et réservations visites LSF sur musee-sourds-louhans.fr)